Aider l’Afrique…mais comment ?
Frédéric Amoudru
Ancien cadre dirigeant du secteur bancaire.
L’invasion migratoire de l’Europe par l’Afrique a pour origine les maux innombrables de ce continent.
Quelques chiffres illustrent cette tragédie. En 1970, 10% des pauvres du monde étaient Africains, en 2020 on en était à 75% et la Banque Mondiale prévoit qu’en 2030 ce sera 90%. C’est la fabrique de la pauvreté globale !
On nous serine que notre avenir dépend de l’Afrique que « nos sorts sont liés » et que pour que les Africains restent chez eux il faut qu’ils y trouvent paix et prospérité.
En fait, nous ne pouvons rien pour elle et pour eux.
Pour s’en convaincre il suffit d’intéresser à la façon dont l’Asie s’est développée.
En comparaison, cette dernière avait au départ beaucoup moins d’atouts que l’Afrique.
Ravagée par les guerres, en partie colonisée puis en partie soumise à la dictature communiste ou à la folie socialiste (Inde), surpeuplée, divisée, moins bien dotée en matière première, il y avait mille raisons de prévoir en 1960 un avenir sombre à cette immense partie du monde alors que l’Afrique nouvellement indépendante comptait à peine 300 millions d’habitants assis sur des richesses minières et agricoles fabuleuses déjà exploitées par les Blancs.
Et pourtant l’Asie s’est incroyablement développée …..et sans notre « aide ».
Il n’y a pas que la Chine et l’Inde qui sont passés de géants humains mais nains économiques à géants humains ET économiques, scientifiques, technologiques avec lesquels nous devons compter.
Il n’y a pas que la Corée, Taiwan, Singapour, Hong –Kong devenus les « dragons asiatiques ».
Il y a aussi l’Indonésie, la Malaisie, la Thaïlande, le Vietnam.
Ce ne n’est pas l’aide occidentale qui a permis à tous ces peuples d’émerger et de nous tenir maintenant la dragée haute.
C’est leur génie et leur travail mais aussi leur entrée résolue dans un processus combiné d’industrialisation et de mondialisation.
A moins d’être un petit pays qui peut se permettre une ultra spécialisation sur la finance, le commerce international et la logistique comme Singapour, Hong Kong ou Dubaï, il n‘y a pas d’alternative à l’industrialisation pour sortir un pays de la pauvreté et le mettre sur le chemin du développement.
Si la post-colonisation est un exemple à peine croyable de gâchis effroyable par les élites africaines des richesses et des chances de leur continent, la réalité strictement économique et sociale est que l’Afrique ne s’en sort pas car elle n‘a pas réussi à s’industrialiser. Pour y arriver l’Asie s’est appuyée sur des élites remarquables ainsi que sur du capital national et international. L’Afrique a des élites politiques, économiques et scientifiques médiocres, compte peu d’investisseurs locaux et attire très peu ceux de l’Etranger qui y voient plutôt des risques que des opportunités. On m’opposera des exceptions comme le Maroc ou une poignée de pays comme peu peuplés et ultra-dotés de richesses naturelles (Botswana, Namibie, Guinée Equatoriale). C’est vrai mais cela ne change rien au cadre général.
Son excès de main d’œuvre, fruit d’une démographie folle et son urbanisation chaotique ne trouvent pas d’exutoire dans la création de millions de boulots dans des usines qui n‘existent pas ou trop peu à l’échelle du continent.
Résultat, toute une jeunesse se retrouve sans boulot ou dans des petits boulots tertiaires dans le secteur informel qui permettent à peine de survivre. D’où la volonté de migrer pour beaucoup d’entre eux.
Face à ce défi, 3 idées principales dominent le débat sur le développement du continent africain.
« Il faut arrêter de les piller » disent en cœur la gauche et beaucoup d’intellos ou de militants décoloniaux. Piller c’est prendre de force et sans payer.
Est-ce ce que l’Occident fait çà à l’Afrique ?
D’abord nous ne sommes plus les uniques clients des matières premières africaines puisque les Chinois sont devenus des partenaires majeurs tant leur industrie est dévoreuse de tout ce qui sort de terre.
Ensuite il faut savoir que l’Afrique est loin d’avoir le monopole de la production de matières premières agricoles, minières et bien sûr pétrolières. Tout ce qu’elle vend, d’autres régions du monde le vendent aussi.
Ainsi on fait aussi du café et du cacao en Amérique Latine et en Asie.
Ainsi on mine de l’uranium, du fer, du cuivre, de l’or, du manganèse, de la bauxite, du diamant en Europe (Russie) en Amérique du sud et du nord, en Asie et en Australie.
Ne parlons pas du pétrole ou du gaz qui jaillit partout.
Pour toutes ces richesses il y a un cours mondial fixé dans des bourses spécialisées et qui s’applique à tous les pays sans distinction d’origine géographique. Il n’y a donc aucune discrimination de prix contre l’Afrique.
La question est de savoir si les entreprises multinationales occidentales, ou pas, qui y exploitent des matières premières font bénéficier les pays africains de ces prix mondiaux.
Elles paient leurs employés, leurs fournisseurs et surtout elles paient les impôts et taxes dus au titre de la législation fiscale locale presque toujours établie avec les conseils des agences de développement des Nations Unies ou de cabinets internationaux spécialisés.
Le problème c’est ce que devient cette manne fiscale versée aux budget des Etats. Une partie plus ou moins importante selon les pays s’évapore dans la corruption des élites africaines. Si encore l’argent de la corruption était réinvesti sur place comme ce fut beaucoup le cas en Asie, le mal serait moindre. Mais non, il part loin et à l’abri.
L’autre thématique est celle d’un plan Marshall pour l’Afrique. Proposition absurde qui montre au minimum l’ignorance de ses tenants.
Le plan Marshall était un programme d’aide américain à la reconstruction de l’Europe de l’Ouest, pas à sa construction. Il s’agissait de remettre debout ce qui existait avant. Pour accueillir ces milliards de dollars il y avait des structures administratives qui n’avaient jamais vraiment cessé de fonctionner même durant l’occupation, il y avait des gouvernements démocratiquement élus, très peu de corruption malgré les privations de l’après-guerre.
Mais il y avait surtout, malgré les pertes de la guerre, des millions de paysans modernisés, d’ouvriers qualifiés, de mineurs, d’ingénieurs, de cadres tous héritiers d’une révolution industrielle et financière solidement ancrée dans le sol européen. Et tous ces gens n’avaient qu’un seul but : rebâtir au prix d’efforts qui paraîtraient lunaires aux adeptes que nous sommes des 35 heures, des « ponts » et des 5 semaines de congés payés.
Enfin il y avait la simplicité d’un seul donneur, l’Amérique et une dizaine de pays récipiendaires.
Rien de tel pour l’Afrique qui n’a pas de tradition industrielle, dont les administrations sont notoirement peu efficaces et corrompues, où la démocratie est encore balbutiante. Plus grave encore le morcellement de ce continent au 53 pays mais également la dispersion de l’aide entre une multitude d’agences de développement nationales et internationales dont les objectifs, les priorités et les modes de fonctionnement varient. Un véritable boxon.
Vient enfin la grande idée du co-développement. Elle n’est pas nouvelle et tout le monde s’y est cassé les dents car elle implique de fait une quasi cogestion ou co-gouvernance entre Occidentaux et Africains pour le développement du continent.
C’est une forme de recolonisation « light » que nous demanderions car nous sommes obsédés, et à raison, par la crainte de voir notre pognon être détourné, ce qui serait politiquement inacceptable pour nos peuples à qui on demanderait des efforts importants pour financer ce grand dessein. Pour les Africains c’est inacceptable. Ils sont souverains et n’acceptent pas une nouvelle forme de tutelle.
Alors au bout du compte on continue tous, pays par pays, à faire notre petite tambouille développementale en se coordonnant ici et là entre nous et avec les agences multilatérales.
C’est un kaléidoscope, un tutti-frutti, un bazar inouï qui au bout du compte apporte quand même quelque chose aux pays récipiendaires mais certainement pas un grand programme de développement rapide de l’Afrique seul capable de convaincre ses peuples de rester au lieu de migrer.
" La France dans cette affaire est un modèle d’ineptie et d’inconséquence. "
L’Agence Française de Développement héritière de la Caisse Française de Coopération Economique qui était fortement centrée sur notre ancien empire colonial -source principal de notre immigration illégale - joue maintenant à être une agence « mondiale ». Elle intervient dans l’ensemble du monde en développement, l’Afrique (toute), l’Asie, le Moyen-Orient, l’Amérique Latine et Océanie et tout ça avec un budget de de 2 milliards d’euros de dons et de 10 milliards de prêts par an. Cela parait beaucoup mais en réalité c’est dérisoire en comparaison des besoins. Il en résulte une dispersion et un saupoudrage effarant de notre aide. Cette approche ridicule reflète l’hubris de nos dirigeants qui, excusez de la grossièreté de l’expression, « pètent plus haut que le cul de la France ». Avec nos moyens limités nous pouvons au mieux avoir un impact significatif sur une vingtaine de pays d’Afrique pour autant que nous y mettions tous nos efforts au lieu de papillonner sur les 5 continents.
Au final soyons lucides, Français, Européens ou Occidentaux, nous ne pourrons pas développer l’Afrique car il n’y a qu’elle qui pourra y parvenir et par elle-même. Cela prendra énormément de temps et pendant ce temps la pression migratoire ne fera que croître.
Face à cela nous avons le choix entre nous défendre comme le font nos amis australiens avec une stratégie de refoulement intransigeante des illégaux à leurs frontières ou bien sombrer petit à petit. Car ne nous y trompons pas, « devenir l’Afrique » est un naufrage non seulement identitaire mais également économique, social, sécuritaire, scolaire et sanitaire.
Combattre l’invasion de la France par le tiers-monde ce n’est pas combattre l’armée russe au risque de sa vie comme le font les Ukrainiens.
C’est juste de l’inflexibilité juridique, policière voire militaire face à des envahisseurs désarmés mais ultra déterminés.
L’inflexibilité exige un courage politique implacable qui n’ a rien à voir avec cet « en même temps » inopérant d’« humanité et de fermeté » que nous serine la Macronie et qui ne résout rien, jamais.
L’inflexibilité ou sombrer à nous de choisir !